Chapitre 1

 

     Bien sûr, il n'est pas question de te rappeler notre amour, notre liaison,

dans les moindres détails.

     Je commencerai au début de notre rencontre, qui était une aventure,

tout commence par une aventure, même les plus grandes amours. Je ne

finirai pas notre histoire au moment de notre séparation, car on ne sait

jamais si fin il y a. Il n'y a que la mort qui soit irrémédiable.

     Il y aura, au fil des lignes des moments forts de notre vie, des coups

d'état d'âme, provoqués par des mots, des gestes, des situations,

suggérant des décisions quelquefois étonnantes.


     Te rappelles-tu...

     Je suis assise à la terrasse du bar. Mon frère avec son amie, pour

s'isoler un peu, viennent de me quitter. Leur promenade sera très

certainement agréable car ce jour ensoleillé du mois de septembre est

particulièrement doux. Je cherche le marque page dans la couverture

du livre dont je me délecte depuis peu : " Les Rois Maudits " de Maurice

Druon. Le marque page tombe. Quelle maladroite !

     Au bord du trottoir d'en face, tu te gares et sors de ta voiture. Je

plonge mes yeux dans mon livre, mais mon attention ne se concentre

pas sur l'action. Je décide de me retourner pour voir si ton image, que

j'ai déjà en moi, est bien réelle. Je n'ai pas le temps de faire un geste.

Tu passes et tu sors du bar en te dirigeant vers ta D.S.

     Il part, déjà !

     Une voix derrière moi t'interpelle, la barmaid sans doute car il n'y a

aucun client dans le bar :

     " Claude ! reviens ! J'ai quelque chose à te dire.

     - Je ne pars pas ! Je prends mes cigarettes dans la voiture ! "

     Il s'appelle Claude ! Il fume ! C'est un peu savoir sur quelqu'un dont

la vue me trouble autant ! Aucune chance ma fille ! La serveuse vient de

l'appeler par son prénom. Certainement, il doit y avoir une histoire

là-dessous.

Je souris à mes réflexions intimes.

     En repassant devant moi, Monsieur Claude me regarde intensément,

au point de me faire baisser les yeux.

     Ma lecture ne me captive toujours pas. Je ferme le livre et le pose

sur la table.

Vais-je oser me retourner ? Non ! Pas encore ! Attends !

     " Me permettez-vous, Mademoiselle, de vous offrir quelque chose

à boire ?

     - Non merci, je viens de consommer. Il n'y va pas par quatre chemins

et cela me plaît !

     - Puis-je m'asseoir un petit moment auprès de vous, sans vous

importuner ? Vous êtes seule ? "

     Je n'ai pas le temps de répondre qu'il est déjà assis à mes côtés, grand,

sûr de lui. Je le dévisage.

     " Que lisez-vous d'intéressant ? "

     La conversation s'interrompt lorsque mon frère et son amie Françoise

surgissent.

     " Eh bien ! Te voilà déjà en compagnie ! On ne peut pas te laisser

seule cinq minutes ! s'insurge gentillement mon frère.

      - Je te présente Claude. "

Ils se serrent la main. Déjà, nous nous apprêtons à partir. Je me lève...

     " Puis-je vous revoir ?

     - Quand le voulez-vous ?

     - Dès que possible !

     - Demain, 11 heures sur la place de l'église, après le vieux pont. "

Le rendez-vous est donné. Je n'osais pas espérer une suite aussi prompte,

en si peu de temps. Lui aussi, m'aurait-il remarqué dès son arrivée...

Mais dans le bar, il y a la serveuse. Qui est-elle ? Une simple amitié

peut-être...

     Au diable toutes ces questions restées sans réponse ! J'ai rendez-vous

demain ! Je le retrouve demain. Seul le revoir compte en ce moment pour

moi !

     Sur le chemin du retour au château où Françoise et moi sommes en

convalescence je dois subir quelques réflexions insidueuses de la part

de mon frère. Mais le ton reste enjoué et nous sommes tous les trois

heureux.


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